Speak – Emily Carroll

 

Éditeur : Rue de Sèvres

Parution : 9 Janvier 2019

Genre : Roman graphique

 

Résumé : Melinda a 15 ans. Ce soir d’été, au beau milieu d’une fête, la jeune fille est victime d’un drame. Elle appelle la police. Personne ne saura jamais pourquoi elle a lancé cet appel, ni ce qu’il lui est arrivé cette nuit-là. Tout simplement parce que Melinda, murée dans son silence, ne parvient pas à l’exprimer…

 

Avis : Quand j’ai découvert ce titre dans le programme des éditions Rue de Sèvres, j’étais sûre qu’il me fallait le découvrir. Adapté d’un roman de Laurie Halse Anderson, sorti il y a quelques années (elle a écrit sa première version à la fin des années 90), ce type d’histoire aurait très bien pu se produire cet été, à deux pas de chez vous.

Un soir d’été, lors d’une fête, Melinda, 15 ans, appelle la police. Pour ses camarades, elle n’est qu’une briseuse d’ambiance. Ce qu’ils ne savent pas, c’est qu’à cette soirée, elle, c’est sa vie qu’on a brisé. Un des participants l’a violée, et depuis, Melinda n’y arrive plus. A sourire, à parler, à se concentrer à l’école. A rester calme quand elle le croise dans les couloirs du bahut. A penser à l’avenir alors que son présent s’effondre et ne ressemble plus à rien. Mais quand son ancienne meilleure amie commence à sortir avec Lui, la jeune fille se dit que c’est peut-être à elle de faire quelque chose. Mais peut-être est-il temps de faire aussi quelque chose pour elle-même ?

Je vais essayer de ne pas trop m’emballer, mais cette BD, waouh. Je suis ressortie de ma lecture, touchée, bouleversée. Comment trouver les mots pour parler du pire ? Comment oser, réussir à en parler ? Du point de vue extérieur – par exemple les parents de la jeune fille, ou les profs – on pourrait se dire que c’est « juste » l’adolescence. Ne pas avoir envie de parler, grogner quand ses parents lui parlent. Mais au final, c’est tellement plus que ça. Le récit d’une fille brisée, encore sous le coup de ce qu’elle a vécu, qui ne sait comment faire face, comment se relever, aller de l’avant, vivre avec ça, surtout en étant régulièrement confrontée à son agresseur.

Emily Carroll arrive, par les mots, les silences, les éclats de voix, et surtout ses dessins, la mise en page, des traits noirs, des yeux sombres, à nous immerger dans l’histoire de Melinda. J’ai souvent eu l’impression d’être avec elle, d’être acculée, j’ai ressenti l’angoisse, la peur, le désespoir et son contraire. Enfermée dans ses mots, dans sa douleur, Melinda m’a tellement touchée.

Ça pourrait être inutile de le préciser, mais non, je le fais quand même : ce roman graphique est un coup de cœur, parce que coup au cœur, parce que cri du cœur. J’aimerais vivre dans un monde où ce genre d’histoire ne serait que fiction. Où ça nous semblerait trop irréel pour être crédible, parce qu’on ne saurait pas ce qu’est un viol. Malheureusement, trop de personnes en sont encore victimes. Alors, parfois, il devient nécessaire de mettre des mots sur les maux. J’ai beaucoup aimé le personnage du professeur d’arts – et l’importance de l’art ici – et ce qu’il apporte à Melinda. Parfois il suffit d’une oreille attentive, d’une main tendue, pour réussir à ouvrir les vannes. Parce que ce roman graphique n’est pas que sombre, ce n’est pas déprimant. C’est aussi l’histoire d’un combat, d’un traumatisme qui devient une force.

En bref, je ne peux que vous recommander ce récit poignant, bouleversant, et pourtant optimiste de cette renaissance après le pire. Si certains d’entre vous on lu ce livre ou le roman de Laurie Halse Anderson, n’hésitez pas à venir m’en parler !

Un grand merci aux éditions Rue de Sèvres pour la confiance et l’envoi !